Certifiée halal

De la guerre d’indépendance (Les folles années du twist) à la rage des enfants de l’immigration (Beur blanc rouge), le réalisateur algérien Mahmoud Zemmouri a toujours pris le parti de rire des sujets qui fâchent. Avec sa septième comédie, la gent masculine en prend pour son grade, des petits gars de banlieue bas de plafond qui tyrannisent les filles au nom d’un islam qu’ils méconnaissent au paysan brutal qui vend sa progéniture pour une dot dérisoire en passant par le cousin combinard retourné au pays arranger de juteux mariages, fûssent-ils forcés…

Western du bled
Si le trait est épais, et la mise en scène assez approximative, ce "western du bled" offre quelques séquences vraiment drôles à la cause des femmes. Et surtout, par sa manière décomplexée de tourner en grosse farce une question qui alimente les fantasmes et la peur, Certifiée halal invite, et c’est rafraîchissant, au combat par la rigolade. Pourtant, il a fallu une médiation du CNC pour que le film, sorti le 13 mai, puisse être distribué par le circuit Gaumont (la seule salle parisienne, à la périphérie du 15e arrondissement, dans laquelle il est à l’affiche, avec une autre à Saint-Denis, dans le 93). Dans un communiqué, la productrice et co-scénariste du film, Marie-Laurence Attias, a dénoncé la confidentialité de cette sortie ratée, estimant qu’une œuvre potentiellement grand public avait subi une forme d’ostracisme, et rappelant qu’en 2006, Beur blanc rouge (quelque 100 000 entrées en France) avait pu être projeté dans des multiplexes stratégiques.
Sujet trop explosif, film trop bâclé, indifférence trop grande au premier public "cible", celui des enfants de l’immigration maghrébine ? Nombre d’autres films à petit budget restent très brièvement à l’affiche, et dans quelques salles seulement, mais il est rare en tout cas que dès la première semaine de son exploitation, un long métrage demeure à ce point fantomatique…

Irène Berelowitch