5Lever le voile, gonfler la voile
« Comprendre les songes et les promesses du mouvement migratoire, souligner les merveilleuses tentatives artistiques, reconnaître ceux qui, avant nous et pour nous, ont tout quitté »
L’histoire ne s’arrête jamais. Elle exerce son pouvoir sur les générations suivantes. Le temps épaissit son mystère, et les récits en sont les témoins subjectifs. Comment transmettre la mémoire quand il y a un vide historique, une absence statistique ? Comment reconstituer ce long chemin qui a commencé dans un autre pays, dans un autre siècle, par une autre langue, et qui continue ici, en France ?
« Lever le voile » est la tentative de reconstruction du grand puzzle, avec ses cases blanches, ses non-dits, ses tabous. Ici, les clés d’un appartement ; là, une planche de bande dessinée ; là encore, les traces d’une enquête minutieuse. Entre les grands récits historiques et le souvenir familial, il y a parfois des histoires reconstituées, fabriquées ou refabriquées avec amour et délicatesse. Ces histoires disent un monde qui essaie de trouver un sens au présent en regardant en face son passé.
De ces vies fauchées par les guerres, la déportation, le génocide, il reste parfois une photo, une lettre et l’hommage tendre d’un frère, d’un ami, d’un petit enfant. C’est un voile qu’on lève, et c’est ainsi que gonfle à nouveau la voile de ce bateau-monde, ce monde-atlas aux multiples tentacules : de l’Argentine au Maroc, de Saint-Pétersbourg à Kaboul.
La mémoire qui lie oralité et statistique, souvenirs et science, création et faits, agit tel un baume à toutes ces années d’épreuve.
Elle répare ce qui a été brisé, elle assemble ce qui a été séparé, elle est une promesse de fraternité.