Des Apaches
Karl Marx, qui passa quelques mois en Algérie pour raisons de santé à la fin de sa vie, en 1882, affirma y avoir découvert, en Kabylie, le socialisme dont il rêvait : une organisation communautaire démocratique, régie par un conseil de village représentatif et par l’impôt progressif. Ce système ancestral, précise une voix off à l’orée de ce film, s’est parfaitement adapté dans l’émigration aux règles du capitalisme, favorisant l’investissement dans les affaires et le règlement harmonieux des litiges.
Mais dans les pas de Samir, trentenaire parisien glandeur et désabusé, sur le point d’enterrer sa mère, le récit documentaire se métisse rapidement de fiction et de rêve. Au cimetière, en suivant un inconnu qu’il devine être son père, le jeune homme se découvre héritier d’un monde qu’il avait toujours fréquenté en étranger, celui des cafés kabyles de Paris, entre Belleville et Barbès...
Nassim Amaouche a le talent de faire vivre par petites touches précises des univers singuliers : une bourgade ouvrière en déshérence du sud de la France dans Adieu Gary (2008) ; la petite Kabylie de Paris et ses marges avec Des Apaches. Il arrive que, comme Samir, on se perde un peu en route, entre l’éblouissante figure d’une mère réincarnée en amoureuse (Laetitia Casta) et la sensibilité ethnographique du regard. Mais la poésie de l’évocation, son mystère, l’emportent sur ses maladresses.
Irène Berelowitch
Des Apaches
Film de Nassim Amaouche (France, 2014, 1h37mn)
Avec Nassim Amaouche, Laetitia Casta, André Dussollier, Djemel Barek
