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Photographie d’Eliane Cohen et de ses amies en Algérie en 1950 ou en 1951.
Photographie d’Eliane Cohen et de ses amies en Algérie en 1950 ou en 1951. Collection du Musée national de l'histoire de l'immigration, Inv 2024.10.7
© EPPPD-MNHI

La famille Partouche

Témoignage recueilli en 2023

Simone Partouche est née à Béni Saf, petite ville située à 100 km au bord de la mer à l’ouest d’Oran en Algérie. Elle a vécu toute son enfance bercée par deux influences : la pêche et les mines de fer. Sa famille possédait un magasin général à Béni Saf. Issue d’une famille juive d’Algérie, elle est contrainte de quitter son pays de naissance 12 jours avant l’indépendance, en 1962, par avion… afin de se mettre à l'abri. « J’ai débarqué à Bordeaux, j’étais avec une amie, une tante et une cousine. Lorsque la situation a vraiment commencé à se dégrader au printemps 62, que les attentats se multipliaient, ma mère voulait que je parte pour la France, que je me mette à l’abri. Mes parents sont restés plus longtemps, ils voulaient attendre de voir comment ça allait se passer. On a pris un taxi de Béni Saf pour l’aéroport d’Oran. Quand nous sommes arrivés, j’ai vu avec stupeur, tout ce monde en train d’attendre, entourés de militaires. On aurait dit un camp. Quand on a vu ça, on a tout de suite voulu repartir, rentrer chez nous. On s’est dirigé vers la sortie mais un garde nous a arrêtés. Maintenant que vous êtes là, vous ne pouvez plus partir. On nous a dit de ne pas nous inquiéter, qu’on aurait un avion le soir même, et on nous a donné un numéro. Les vols desservaient Paris, Bordeaux, Marseille. On voulait prendre Marseille car proche de Nice où Eliane habitait déjà. Finalement Air France n’assurait plus les vols de la journée. On a passé la journée entière et la nuit, on n’avait rien pris à manger. C’était une désorganisation totale. Personne n'avait été préparé. On a finalement réussi à avoir un vol pour Bordeaux avec Air Italia. On a été accueilli par des bénévoles et on a pu dormir chez l’habitant ou dans un hôtel. Le lendemain, on a pris le train pour Nice. Mais à la fin de toutes ces épreuves, j’arrivais et j’étais attendue. Ceux qui n’avaient nulle part où aller, on les laissait dans des camps séparés. Hommes d’un côté, femmes et enfants de l’autre. Il y avait une grande demande pour la Côte d’Azur pour son climat. Celui de la France nous faisait peur, Jojo, mon frère, est parti avec son copain en bateau, car son père avait un chalutier. Il est arrivé en Espagne, puis il a pris le train jusqu’à Nice. C’était dur. L’année 62 a été difficile. » (SP, 2021)

Gérard Partouche, est né à Tiaret, grande ville située au nord-ouest de l’Algérie. Il ne peut quitter l’Algérie avant l’indépendance car il termine son service militaire. Le 10 novembre 1962, à la fin de son service, il quitte enfin la baie d’Alger. Après un jour et demi de traversée, il débarque au port-Vendres et est directement mis dans un train en direction de Toulouse. Les deux jeunes adultes se marient le 27 décembre 1962, quelques mois après leur arrivée en France. 

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Ouvrage réalisé par Hannah Puzenat
Ouvrage réalisé par Hannah Puzenat, petite-fille de Simone et Gérard Partouche. Mémoire rédigé pour son Diplôme national supérieur d'expression plastique (DNSEP) Communication option didactique visuelle, à la Haute école des arts du Rhin en 2020. Collection du Musée national de l'histoire de l'immigration, Inv. 2024.10.11
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Ouvrage réalisé par Hannah Puzenat
Ouvrage réalisé par Hannah Puzenat, petite-fille de Simone et Gérard Partouche. Mémoire rédigé pour son Diplôme national supérieur d'expression plastique (DNSEP) Communication option didactique visuelle, à la Haute école des arts du Rhin en 2020. Collection du Musée national de l'histoire de l'immigration, Inv. 2024.10.11
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Mémoires croisées : le travail de reconstitution et de visualisation d’Hannah Puzenat

En 2021, pour son DNSEP de didactique visuelle à la Haute-Ecole des Arts du Rhin, Hannah Puzenat, l’une des petites-filles de Simone et Gérard Partouche, développe le projet d’une installation numérique documentaire : Mémoires croisées. Accompagnée d’un mémoire intitulé Sur les traces d’un pays conté, ce travail est l’occasion pour elle de comprendre et croiser les mémoires des diverses communautés qui ont dû quitter l’Algérie après la guerre d’Indépendance. A l’aide d’un récit cartographié, l’étudiante raconte les parcours de ses grands-parents de l’enfance à leur départ d’Algérie. La cartographie présentée s’anime au fur et à mesure du récit oral, pour représenter des territoires personnels animés par l’histoire de ses grands-parents. « Ce sont des cartes vivantes d’un monde entre le réel et le souvenir, des cartes sensibles. J’ai élaboré un nouveau lexique, de nouveaux codes de représentation cartographique pour construire des cartes mémorielles et narratives à partir d’outils numériques. Mon but est de représenter des territoires personnels animés par des histoires singulières » (HP, 2021). 
En savoir plus sur ce travail

Elisabeth JOLYS-SHIMELLS, conservatrice en chef du Patrimoine en charge de la collection Témoignages et société

Informations

Inventaire
2024.10.7
Type
Photographie
Date
1950
Matériaux

papier (procédé argentique)

Dimensions

H. 7,1 cm, l. 11,2 cm