Foreigners in the wars in France

L'affiche rouge

De nombreux étrangers présents en France avant la guerre, en particulier ceux qui avaient fui le fascisme et la tyrannie dans leur pays, y compris des Allemands, se sont engagés dans la Résistance en France. L’épisode de l’Affiche rouge est là pour rappeler la grandeur de leur engagement et leur martyre.

Les structures clandestines

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Guerre 1939-1945. FFI devant leur cantonnement © Roger Viollet
Guerre 1939-1945. FFI devant leur cantonnement © Roger Viollet

Dans la résistance communiste, des “groupes de langue”, rassemblés dans une structure clandestine appelée Main-d'œuvre immigrée (MOI), opèrent au sein d'unités militaires relevant des FTP (Francs-tireurs et partisans). Au début de 1944, l'occupant et les séides de la collaboration tentent de compromettre la Résistance en jouant les cartes du racisme, de l’antisémitisme et de la xénophobie.

Les fusillés du Mont-Valérien

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Missak Manouchian © Centre de recherche sur la diaspora arménienne (CRDA)
Missak Manouchian © Centre de recherche sur la diaspora arménienne (CRDA)

Du 15 au 18 février 1944, 23 accusés comparaissent à Paris, devant une cour martiale allemande. Ils forment le noyau d'intervention, parmi un groupe de 68 francs-tireurs et partisans de la MOI incarcérés depuis trois mois et quotidiennement torturés. Le verdict tombe le 21 février au matin et, le jour même, tous sont fusillés au Mont-Valérien, à l'exception de la Hongroise Olga Bancic, qui sera décapitée à Stuttgart le 10 mai 1944.

Des libérateurs présentés comme des criminels

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Service de propagande allemande, Des libérateurs ? La libération par l'armée du crime !, 1944
Service de propagande allemande, Des libérateurs ? La libération par l'armée du crime !, 1944, France, impression sur papier, 58 cm x 81,5 cm, Musée national de l'histoire de l'immigration, inv. 2018.282.1
© EPPPD-MNHI

Tout de suite après, une affiche est placardée en 15000 exemplaires sur les murs de France. Le tract qui l’accompagne présente ces libérateurs de l'intérieur comme un ramassis de tueurs

“Si des Français pillent, volent, sabotent et tuent... Ce sont toujours des étrangers qui les commandent. Ce sont toujours des chômeurs et des criminels professionnels qui exécutent. Ce sont toujours des juifs qui les inspirent. C’est l’armée du crime contre la France. Le banditisme n’est pas l’expression du Patriotisme blessé, c’est le complot étranger contre la vie des Français et contre la souveraineté de la France.”

Une propagande ratée

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Affiche "Gloire à nos martyrs" © Centre d’éude et de documentation de l'émigration Italienne (CEDEI)
Affiche "Gloire à nos martyrs" © Centre d’éude et de documentation de l'émigration Italienne (CEDEI)

Il est certes difficile de mesurer l'impact exact de cette affiche, passée à la postérité sous le nom d’Affiche rouge, sur les Français. Il est certain qu'ici et là des mains anonymes ont déposé des fleurs au pied de ces affiches ou ont collé dessus des bandeaux où l'on pouvait lire : “Des martyrs”, ou “Oui ! L'armée de la Résistance”. Sur les visages émaciés des martyrs, les passants ont sans doute lu surtout les tortures subies. Peut-être ont-ils perçu le mur en arrière-fond comme celui des fusillés, tombés pour que vive leur nouvelle patrie. Il est clair, en tout cas, que la propagande allemande et collaborationniste n'a pas atteint son but. “L'armée du crime” n'a pas fait horreur à une population qui pourtant, à chaque attentat, souffrait des prises d'otages. Si cette affiche suscita de la haine, ce fut contre les bourreaux, et non contre ces patriotes venus d'ailleurs.

Strophes pour se souvenir

Vous n'avez réclamé la gloire ni les larmes

Ni l'orgue ni la prière aux agonisants

Onze ans déjà que cela passe vite onze ans

Vous vous étiez servi simplement de vos armes

La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans

Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes

Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants

L'affiche qui semblait une tache de sang

Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles

Y cherchait un effet de peur sur les passants

Nul ne semblait vous voir français de préférence

Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant

Mais à l'heure du couvre-feu des doigts errants

Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE

Et les mornes matins en étaient différents

Tout avait la couleur uniforme du givre

A la fin février pour vos derniers moments

Et c'est alors que l'un de vous dit calmement

Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre

Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand

Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses

Adieu la vie adieu la lumière et le vent

Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent

Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses

Quand tout sera fini plus tard en Erivan

Un grand soleil d'hiver éclaire la colline

Que la nature est belle et que le coeur me fend

La justice viendra sur nos pas triomphants

Ma Mélinée o mon amour mon orpheline

Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant

Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent

Vingt et trois qui donnaient leur coeur avant le temps

Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant

Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir

Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant
.”

Louis Aragon (1897 - 1982) Le Roman Inachevé, 1956 Ce poème est chanté par Léo Ferré sous le titre l'Affiche Rouge.