D’un rivage de l’écriture l’Autre ?
Entretien avec Jean-Michel Devésa, professeur des universités à Limoges et écrivain
Hommes & Migrations : La recherche sur la production littéraire sur l’exil et les migrations est-elle ancienne en France ? Constitue-t-elle un domaine de recherche constitué comme, peut-être, l’histoire de l’immigration ? Quels sont aujourd’hui les modèles théoriques opératoires ?
Jean-Michel Devésa : Je vais tenter, comme vous m’y invitez, d’examiner, peut-être de radiographier, le domaine d’étude et de recherche auquel je participe, celui de l’appréhension des littératures française et en français contemporaines. J’appuie mes propos et mes analyses sur la prise en compte de ce qui, désormais, met en mouvement une masse considérable de personnes, des familles, mais souvent de jeunes gens, fréquemment des adolescents et des mineurs, notamment en provenance d’Afrique (Somalie, Soudan, Tchad, Nigeria, Côte d’Ivoire, Mali, Niger, Comores, etc.), du Moyen-Orient (Syrie, Irak, Kurdistan, etc.) et d’Asie centrale (Iran, Afghanistan, etc.), lesquels sont prêts à tout risquer, y compris leur existence, pour rejoindre l’Europe, la plupart du temps par ses rives méridionales. Non qu’ils espèrent y trouver une vie meilleure que celle qu’ils ont, mais bien parce qu’ils jugent que c’est seulement là, et plus du tout « chez eux », qu’ils auront une chance de ne pas (dé)périr, qu’ils auront simplement la possibilité de survivre.