Citoyen d’honneur
Film de Mohamed Hamidi (France, 2022)
Samir Amin (Kad Merad) est un écrivain comblé, prix Nobel de littérature, qui vit à Paris, replié sur lui-même, loin de son pays natal, l’Algérie. Il refuse systématiquement toutes les invitations qui lui sont faites jusqu’au jour où, contre toute attente, il décide d’accepter d’être fait « citoyen d’honneur » de Sidi Mimoun, la petite ville où il est né. Parti à 19 ans, il n’y est jamais revenu depuis quarante ans… Mais est-ce vraiment une bonne idée que de revoir les habitants de cette ville qui sont devenus d’année en année des personnages de ses différents romans ? L’écrivain franco-algérien traverse une phase dépressive mais finit par accepter de partir. Peu à peu, au fil de ses rencontres, il redevient combatif et heureux de vivre. Dès lors, il ne va cesser de subir une série de péripéties drôles et émouvantes.
Avec Citoyen d’honneur, Mohamed Hamidi signe encore une comédie caustique, comme il a su le faire au préalable avec Né quelque part et La Vache, lequel fut un grand succès public.
Pour la première fois, Mohamed Hamidi ne s’inspirera pas d’une idée originale mais d’une adaptation. Il précise : « C’est en fait le remake d’un film argentin El Ciudadano Ilustre de Mariano Cohn et Gastòn Duprat (Les Nouveaux sauvages). L’accueil du personnage, dans le film argentin, est très dur dans ce village qui n’a plus rien à voir avec celui qu’il connaissait. Il se fait malmener et regrette presque d’y être allé… Ce qui n’est pas le cas dans mon film. J’ai aussi ajouté un personnage drôle et solaire, celui de Miloud (brillant Fatsah Bouyahmed). C’est une comédie que je qualifierai de sociale, et le sujet reste l’histoire d’un retour aux sources. »
Plutôt que de filmer en Algérie, le cinéaste a préféré choisir le Maroc où il a déjà tourné ses deux précédents films. Il collabore aussi au festival Le Marrakech du rire. L’Algérie d’aujourd’hui est évoquée dans le film avec toute sa complexité et aurait, d’après lui, constitué un obstacle majeur pour un tournage sur place. « Par contre, dit Hamidi, j’ai fait le repérage à partir de mes propres photos et souvenirs dans ma belle ville de Nedroma, dans l’Ouest algérien pas très loin du Maroc. C’est l’endroit où je vais quand je suis là-bas. La maison de mes parents est à quelques kilomètres. »
Comme dans ses précédentes œuvres, on retrouve dans Citoyen d’honneur une confrontation entre deux milieux différents. « J’ai déjà raconté dans mes premiers films une rencontre entre la France et l’Algérie, explique le réalisateur, mais entre catégorie sociale, ouvrière et paysanne. Là, il s’agit d’un écrivain reconnu internationalement. Je me suis d’ailleurs inspiré de gens comme Amine Malouf, Yasmina Khadra, Boualem Sansal, Tahar Ben Jelloun, des écrivains installés et reconnus, qui sont partagés entre la France où ils vivent et travaillent et le pays où ils sont nés. Lorsque mon personnage principal, grand écrivain international, se retrouve face à Miloud et à des employés de mairie, des gens simples qui ressemblent à ceux de mon village et qui portent à leur manière la culture algérienne, on parle de choc des cultures mais aussi de choc social. »
Outre le personnage de Miloud haut en couleur (Fatsah Bouyahmed), dont le caractère est l’opposé de celui de Samir, Kad Merad, lui, porte le film de tout son talent et s’est inspiré de ses souvenirs d’Algérie dont il a nourri fortement son personnage…
Citons aussi la présence dynamique de Selma (Oulaya Amamra), étudiante et rappeuse qui va participer, avec tout son enthousiasme à faire renaître la joie de vivre chez Samir. Oulaya cite sa phrase préférée dans le film : « Mais si je pars, qui va changer les choses ici ? »
Dans la galerie de portraits qui composent la population de Sidi Mimoun, on remarque évidemment les plus connus, Zinedine Soualem, Brahim Bouhlel et Djamel Debbouze. La musique est composée par Ibrahim Maalouf, mais les spectateurs reconnaîtront aussi les accents de « Ya Rayah » de Dahmane El Harrachi. Le film est sorti en France le 14 septembre 2022.