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Michel BELLELLE, Maquette de l'Aurore, années 1990
Michel BELLELLE, Maquette de l'Aurore, années 1990, Musée national de l'histoire de l'immigration, inv 2022.25.1
© EPPPD-MNHI

L'Aurore

L’Aurore est un navire imposant de 300 tonneaux (849,504 m3), construit au XVIIIe siècle à l’initiative d’un armateur nantais comptant un équipage de 45 personnes sous les ordres d’un capitaine. Il est un des plus gros vaisseaux français ayant participé au commerce d’esclaves.

Un voyage type de l'Aurore

D'après un ouvrage de Jean Boudriot, qui fournit des informations détaillées sur l'une des traversées effectuées en 1784, on sait que l’Aurore, parti de Nantes, transportait 19 170 pièces. La cargaison est variée puisqu’elle est composée entre autres d’alcools, d’armes, de fausses indiennes (tissus imprimé)… Il faut compter entre 60 à 120 jours pour effectuer le voyage jusqu’en Afrique en fonction des routes choisies. Une fois arrivée, la cargaison est échangée contre 600 esclaves. La route du vaisseau nantais continue en direction des Antilles dans des conditions extrêmement difficiles pour les hommes, les femmes et les enfants entassés dans la cale du vaisseau. Entre maladies et suicides (par désespoir ou acte de résistance), le taux de mortalité d’une traversée s’élève en moyenne à 12%. La dernière étape du voyage consiste à vendre les esclaves puis à revenir en France avec de nouvelles marchandises, principalement du sucre, du café et de l’indigo à destination des consommateurs européens. L’armateur dégageait un bénéfice de 300 000 livres à chaque traversée.

Le commerce transatlantique

Cette route, empruntée par l’Aurore, fait partie du commerce triangulaire, aussi appelée « traite des Noirs ». Au premier quart du XVIIIe, la demande d’esclaves dans les plantations américaines fait quadrupler le prix des captifs, les razzias et les enlèvements s’accentuent si bien qu’à la fin du siècle la moyenne annuelle est de 100 000 individus déportés. Afin de maximiser les bénéfices d’une traversée, les navires européens ramènent des produits exotiques avec la somme gagnée sur la vente des esclaves. Dans le cadre de la loi Taubira de 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité, l’historien Jean Hébrard définit cette pratique comme « un crime qui ne peut être oublié » (Jean Hébrard, préface de l’ouvrage de Marie-Albane de Suremain, Enseigner les traites, les esclavages, les abolitions et leurs héritages, ed Karthala, 2021).

Nantes, plus grand port de la métropole

Nantes est considérée comme « la capitale incontestée du trafic négrier » en France (Eric Saugera « Nantes », Outre-Mers, vol. 412-413, no. 2, 2021). 41% de la traite française passe par son port ce qui correspond à 1780 expéditions entre 1657 et 1830. Ce sont ainsi 400 000 Noirs qui sont contraints par des armateurs nantais d’aller en Amérique. L’essor de ce commerce au XVIIIe siècle favorise d’une part le développement urbain avec une population qui double, passant de 40 000 en 1700 à 80 000 en 1789, mais également le développement économique et social de la ville. Puisque ce commerce devient pour les armateurs un moyen de s’enrichir et de s’anoblir à travers l’acquisition de lettre de noblesse. L’Aurore tient, tout comme les autres navires de ce commerce, un rôle central dans le déplacement forcé des populations africaines vers les Amériques au XVIIIe siècle.

 

Julien Derni

Informations

Inventaire
2022.25.1
Type
Objet
Date
1990