Éditorial

Du stade au podium

Rédactrice en chef de la revue

Les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 se sont engagés en faveur de l’environnement durable et par la mise en valeur de la diversité dans le sport. L’exposition Olympisme, une histoire du monde, présentée au Palais de la Porte Dorée d’avril à septembre en partenariat avec le groupe de recherche l’Achac, relève ce défi et retrace 130 années de Jeux olympiques à travers un vaste panorama géopolitique où les mutations d’une histoire mondialisée sont radiographiées sous l’angle de leurs conséquences sur l’organisation des éditions sportives successives. Les conflits entre démocraties et régimes totalitaires, l’histoire des empires coloniaux puis des décolonisations, les luttes des minorités pour leur reconnaissance soulignent combien l’altérité est au cœur des enjeux politiques et sociétaux du sport.

Sous le maillot tricolore

La revue a choisi d’aborder l’histoire des compétitions olympiques sous le prisme des migrations humaines afin de compléter l’imposant catalogue raisonné de cette exposition (La Martinière, 2023). Mobilisant les travaux des spécialistes de l’histoire du sport, Yvan Gastaut et Stéphane Mourlane coordonnent une galerie de portraits exhaustive des médaillés olympiques français nés à l’étranger depuis la première édition des Jeux olympiques en 1896 à Athènes, complétée par deux figures « indigènes » issues des colonies françaises. Les trajectoires de ces athlètes questionnent la manière dont les parcours migratoires interfèrent sur leurs performances sportives d’exception. Si la moisson de médailles offertes au palmarès français enrichit le rayonnement international d’un pays qui a su accueillir ces sportifs d’une manière ou d’une autre, elle résulte aussi du brassage social et culturel que les compétitions favorisent pour « faire équipe » sous la bannière d’un même drapeau. Ces athlètes érigés en héros le temps des Jeux subissent pourtant des attaques racistes et xénophobes conspuant leurs exploits au nom de leur « étrangeté », à l’encontre des valeurs universelles du sport. Leurs parcours sociaux, souvent fragilisés par leur altérité, les confrontent au conflit de loyauté entre un pays natal auquel ils restent attachés et un pays qu’ils ont adopté en dépit des débats récurrents autour de la naturalisation. En tâchant de sortir de l’anonymat des sportifs le plus souvent oubliés de l’Histoire, ce numéro entend contribuer à leur reconnaissance.

Les multiples usages du sport en exil

Au-delà de cette galerie de médaillés « bronze, argent, or », le portfolio interroge la diversité du sens et des pratiques sportives dans les parcours des immigrés et de leurs descendants en France à travers une sélection de la collection du Musée national de l’histoire de l’immigration. Le sport apporte ainsi sa pierre à la construction d’un patrimoine de l’immigration plus ouvert. Qu’elles soient amateures ou professionnelles, les pratiques sportives sont ici questionnées dans leurs fonctions multiples en contexte migratoire : lieux de reconstruction des corps et des esprits traumatisés par l’exil contraint, points d’ancrage d’une sociabilité populaire, espaces d’embrigadement politique ou d’engagement militant pour les droits des étrangers et contre le racisme, vecteurs d’espoirs de promotion sociale, figures médiatiques incarnant « une France de la diversité »… D’autres articles analysent également le rôle du sport dans les quartiers populaires depuis le début du XXe siècle et insistent sur l’introduction de certains sports ou la création d’associations sportives fondées sur une même origine étrangère, comme les premiers clubs de foot tournés vers la conservation d’un entre-soi britannique.

Des articles en accès libre

Bonne nouvelle en ce début d’année ! Sous l’impulsion du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, la revue peut désormais bénéficier du nouveau dispositif intitulé « Souscrire pour ouvrir », permettant la suppression de sa barrière mobile en ligne. La diffusion de l’ensemble des articles de la revue dès leur date de parution est désormais entièrement en accès libre sur les plateformes OpenEdition et Cairn.