Racisme(s) dans les collections du Musée national de l’histoire de l’immigration
« Exposer le racisme et l’antisémitisme au Musée », telle était la problématique du colloque international qui fait l’objet de ce numéro d’Hommes & Migrations. Pour accompagner et illustrer les questionnements associés à cet enjeu multiple et sensible, la rédaction a parcouru les collections du Musée national de l’histoire de l’immigration en vue de sélectionner une vingtaine d’œuvres pouvant y répondre.
D’emblée, certaines thématiques du colloque se sont avérées impossibles à présenter – la Shoah, l’esclavagisme et la traite, le racisme contre les Afro-Américains – car les scientifiques et patrimoniaux du Musée n’ont pas eu vocation à les aborder dans ses collections jusqu’à présent. D’autre part, les questions d’antisémitisme n’ont pas donné lieu à des acquisitions nombreuses, même si la presse populaire de la fin du XIXe siècle s’est exprimée abondamment par un discours antisémite, au moment de l’affaire Dreyfus (1894-1906) notamment, ou en lien avec les populations juives d’origine étrangère, comme les Russes ou les Polonais fuyant les Pogroms, ou bien les Allemands pourchassés par le régime nazi dans les années 1930. Pour la thématique du racisme anti-rom, suite à l'exposition en 2018 intitulée « Mondes tsiganes, la fabrique des images », le Musée a pu acquérir des cartes postales dont un exemplaire est présenté dans cette sélection du portfolio.
En revanche, la thématique de la xénophobie, que l’on pourrait qualifier de racisme anti-étranger, et celle du racisme ciblant les populations noires et musulmanes s’avèrent davantage couvertes dans les collections du Musée, avec une grande diversité d’œuvres (lithographies, publicités, affiches, dessins de presse, photographies, art contemporain) qui s’étirent du milieu du XXe siècle aux décennies les plus récentes.
L’organisation de ce portfolio est à la fois chronologique et par types de support. Les contributeurs qui ont accepté de commenter des œuvres ont eu pour consigne de les contextualiser historiquement, mais aussi de déconstruire les préjugés et les stéréotypes racistes qu’elles présentent des populations concernées. Ils ont également envisagé dans quelle mesure ces œuvres peuvent constituer des ressources pédagogiques ou muséales pour sensibiliser les publics à la fabrication des imaginaires racistes sur l’immigration et contribuer à ce changement des regards sur les étrangers que le Musée tente de favoriser par ses collections et sa programmation. En ce sens, espérons que ce portfolio puisse constituer un panel utile dans la réflexion collective sur le poids des héritages et des prismes négatifs qui nous enferment, parfois inconsciemment.