Kyriakos Kalaitzidis, fondateur de l’Ensemble En Chordais
Le samedi 11 décembre 2021, pour son Week-End Grèce, la Philharmonie de Paris proposait dans sa grande salle Exil, une oeuvre du compositeur et joueur de oud grec Kyriakos Kalaitzidis, fondateur et directeur artistique de l’Ensemble En Chordais.
Les six membres de son orchestre étaient rejoints sur scène par huit musiciens, danseurs et chanteurs, ainsi que par Maria Farantouri, diva et passionaria interprète des oeuvres de Mikis Theodorakis, dont la profonde voix de contralto galvanisait la dernière partie du spectacle. Créée en Grèce en 2005, six ans avant le déclenchement de la guerre civile en Syrie, Exil entre aujourd’hui en résonance avec la situation de crise migratoire qui perdure notamment en Méditerranée. Voilà bientôt un siècle, son bassin oriental était terriblement affecté par les échanges de populations entre la Grèce et la Turquie, forcés en 1922, puis entérinés par le traité de Lausanne en 1923. Les parents de Kyriakos Kalaitzidis, émigrés à Thessalonique où il a vu le jour, faisaient partie des 1,6 million de Grecs contraints de quitter les territoires d’Anatolie où leurs familles vivaient depuis des générations. «Ma jeunesse a baigné dans les histoires du pays perdu: Pontos [région côtière au Sud de la Mer Noire, Karadeniz pour les Turcs, ndr] pour la famille de mon père, et la Cappadoce pour celle de ma mère, dit Kyriakos Kalaitzidis. La ville de Thessalonique, où j’ai grandi, était pleine de réfugiés: la première génération était celle de nos grands-parents, la deuxième celle de nos parents, et j’appartenais à la troisième génération. Bien que nous soyons nés dans cette ville où nous avons passé toute notre vie, nous nous considérions quand même comme la troisième génération. Il ne s’agissait pas d’une posture politique, mais d’un très fort sentiment d’appartenance culturelle. Aussi, quand j’ai commencé à jouer de la musique et à composer, l’évocation de cette mémoire culturelle, avec son expression particulière, m’est venue naturellement. La musique de l’exil parle de choses intimes. Peut-être ne les ai-je pas vécues personnellement, mais j’en suis imprégné à travers le vécu de ma famille.»