Qu’entend-on par diaspora ?
Le terme "diaspora" vient du grec spiro, qui veut dire "je sème". Il désigne habituellement les populations chassées de leur pays, qui entretiennent entre elles des liens affectifs, culturels, économiques et politiques par-delà les frontières. En France, les diasporas juives et arméniennes sont les plus connues ; elles se réfèrent à un territoire perdu, point de départ d’une vie rythmée par la mobilité.
Questions de définition
Idée de dispersion donc et de liens maintenus avec le pays d’origine… le terme fait aujourd’hui florès aussi bien dans les « communautés » migrantes que dans les études et recherches universitaires. Cette inflation du mot relève de plusieurs dynamiques : multiplication des migrations internationales et recompositions des identités, souci de répondre positivement aux situations de migrations par les populations elles-mêmes.
Difficile parfois de mesurer la différence entre phénomènes migratoires et diasporas. Ici les spécialistes et la recherche débattent entre des conceptions fermées et ouvertes de la diaspora. L’OIM en donne une définition extrêmement large définissant les diasporas comme « les migrants ou les descendants de migrants dont l’identité et le sentiment d’appartenance ont été façonnés par leur expérience migratoire et leur parcours » et de retenir l’existence d’une mémoire collective, d’un lien maintenu avec le pays d’origine, l’existence d’une forte conscience de groupe et un sentiment de parenté avec les autres diasporas du groupe.
C’est ainsi que fleurissent les diasporas dans le monde, le tout stimulé par l’action conjuguée de la technique – communications et transport – et du politique – redéfinition et recomposition des identités nationales et des identités collectives, multiculturalisme d’inspiration anglo-saxonne.
Des réseaux transnationaux à l’échelle mondiale…
Aujourd’hui, dans le monde, les deux plus grandes diasporas constituées par des migrations sont caractérisées par des réseaux transnationaux très puissants entre les différentes communautés : la diaspora chinoise, évaluée entre 30 et 50 millions de personnes, et la diaspora indienne, évaluée entre 16 et plus de 25 millions de personnes. Ces diasporas sont présentes sur plusieurs continents et s’alimentent de réseaux économiques et de transferts de fonds qui favorisent la permanente mobilité de leurs membres.
Parmi les autres pays d’origine des diasporas viennent le Mexique (12 millions), la Russie, le Bangladesh, le Pakistan et l'Ukraine.
… et à l’échelle européenne
En Europe, deux diasporas émergent. Issues de migrations économiques, elles entretiennent des réseaux économiques, politiques, religieux et matrimoniaux à l’intérieur même de l’Union européenne. La première est la diaspora turque : évaluée à plus de 5 millions de personnes, elle est présente non seulement en Allemagne et en Autriche, où elle constitue plus de la moitié de l’immigration, mais aussi en France, dans les pays scandinaves et au Bénélux.
La seconde, avec près de 5 millions de personnes, est marocaine ; elle est présente en France, en Italie, en Espagne, aux Pays-Bas, en Belgique et elle représente l’une des trois premières nationalités de l’immigration dans ces pays. Les diasporas se distinguent de la notion de "couples migratoires" qui désigne les cas où une nationalité étrangère s’installe dans un seul pays d’accueil comme c’est encore le cas des Algériens en France (plus de 90 % des Algériens présents en Europe). Mais ici aussi les parcours migratoires se diversifient et de nouvelles destinations émergent, en direction notamment des USA et du Canada.
Mustapha Harzoune, 2022