Qu'est-ce qu'un immigré ?
Un terme en vogue depuis la deuxième moitié du XXe siècle
L’usage du terme « immigré » s’est généralisé depuis le milieu du XXe siècle pour désigner l’immigration de main-d’œuvre. Depuis 1945, on parle couramment de main-d’œuvre immigrée ou de travailleur immigré et le terme tend, dans la langue courante, à remplacer celui d’« étranger ». À partir du début des années 1990, « immigré » est devenu une catégorie statistique, utilisée par les démographes pour désigner toute personne née étrangère à l’étranger et résidant en France. Un immigré peut ainsi ne pas être étranger – c’est le cas des individus nés à l’étranger et naturalisés Français. Et un étranger peut ne pas être immigré, s’il est né étranger sur le sol français.
Des chiffres et un écart
La catégorie « immigré » - qui comprend les Français par acquisition (nés hors de France) et les étrangers (nés hors de France) - s’élève, en 2020, à 6,8 millions, soit 10,2 %. Les Français par acquisition nés hors de France sont 2,5 millions, soit 36% d’entre eux : ils ne sont donc plus étrangers. Comme le précise l’Insee : « A la différence de celle d'immigré, la qualité d'étranger ne perdure pas toujours tout au long de la vie : on peut, sous réserve que la législation en vigueur le permette, devenir français par acquisition. » Ainsi les « Français par acquisition » restent selon la statistique nationale, des « immigrés », renvoyés à une catégorie qui, au lieu de les fondre dans le commun républicain, spécifie si ce n’est leur extranéité à tout le moins leur particularité. Selon le démographe Hervé Le Bras, hier tout était simple : on était français ou étranger. Aujourd’hui on peut être français, mais Français “immigré”. La “nocivité” du mot est de faire “fi de la naturalisation”, et plus grave, d’avoir “gonflé la partie étrangère en lui adjoignant les naturalisés, ce qui a creusé l’écart entre ces derniers et les Français”. Ainsi, en renvoyant le naturalisé à son étrangeté on élargirait, “le fossé […] entre les Français de naissance et les immigrés”. Toujours selon le démographe, cela traduirait “une dichotomie de plus en plus grossière : nous et les autres”, une division entre national et étranger qui ne retient que la logique du chiffre (la peur de l’invasion) au mépris de l’histoire des hommes et des nations, du dialogue des cultures, des logiques politiques et de la marche du monde. Le Français naturalisé reste un immigré renvoyé à son altérité, comptabilisé comme tel au détriment des dynamiques humaines et… républicaines.
Principales caractéristiques de l’immigration aujourd’hui
La part des immigrés originaires d’Afrique subsaharienne augmente depuis 2006. L’immigration en provenance d’Afrique du Nord reste stable et représente près du tiers de l’ensemble de l’immigration en provenance d’Afrique. En 2020, 47,5 % des immigrés vivant en France sont nés en Afrique. 32,2 % sont nés en Europe. Les pays de naissance les plus fréquents des immigrés sont l'Algérie (12,7 %), le Maroc (12 %), le Portugal (8,6 %), la Tunisie (4,5 %), l'Italie (4,1 %), la Turquie (3,6 %) et l'Espagne (3,5 %). La moitié des immigrés sont originaires d'un de ces sept pays (49 %).
Les femmes sont légèrement majoritaires parmi les nouveaux arrivants en 2019 (52 %). Leur proportion est plus forte parmi les immigrés originaires de Russie (66 %), de Chine (61 %), du Brésil (57 %) ou encore d’Algérie (56 %).
Près de 60 % des nouveaux arrivants immigrés ont moins de 30 ans : un quart sont mineurs et un tiers sont âgés de 18 à 29 ans.
24 % des immigrés arrivés en 2019, âgés de 15 ans ou plus, sont sans diplôme (contre 20 % pour l’ensemble de la population) et 43% (contre 30%) sont diplômés du supérieur. Les femmes y sont plus diplômées que les hommes, et le niveau de formation de l’ensemble des immigrés progresse de génération en génération, notamment au sein de l’immigration originaire d’Asie.
Sources :
- Insee
- Hervé Le Bras, L’Invention de l’immigré, Éditions de L’Aube 2012
Mustapha Harzoune, 2022