Qu'est-ce qu'un "mineur non accompagné " ?
Immigration des enfants
Un mineur non accompagné́ (MNA) auparavant nommé mineur isolé étranger (MIE) est un enfant de moins de 18 ans, de nationalité étrangère, arrivé sur le territoire français sans être accompagné par l’un ou l’autre des titulaires de l’autorité parentale ou par un représentant légal.
La Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE), ratifiée par la France, stipule dans son article 20 que « tout enfant temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciale de l’État y compris les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, sans considération de leur nationalité, de leur statut au regard de l’immigration ou de leur apatridie ». Les MNA qui arrivent dans notre pays, ont donc droit à la même protection que tout autre enfant.
Mineurs non accompagnés
En 2011 le pays comptait selon le ministère de l’Intérieur 6 016 MNA (8 000 selon des sources associatives). En 2019, selon les chiffres du ministère de la Justice (Mission mineurs non accompagnés), ils étaient 16 760 (contre 17 022 en 2018, 14 908 en 2017 et 8 054 en 2016). En 2020, sans doute en raison de la pandémie du Covid, le nombre retombait à 9 524.
Au 31 décembre 2019, 31 009 MNA étaient pris en charge par les conseils départementaux. Au regard des chiffres publiés par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), 8,4 % des mesures d’aide sociale à l’enfance en 2019 concernaient des mineurs non accompagnés et 15,8 % des mineurs accueillis à l’aide sociale à l’enfance (ASE) étaient des mineurs non accompagnés.
En 2019 : 95,5 % des MNA étaient des garçons (soit 16 009) et 4,5 % des filles (751). En 2020 la répartition s’établissait comme suit : 94,2% de garçons (soit 8968) et 5.8 % de filles (soit 556).
En 2019, les enfants de 15 à 17 ans représentaient 90 % des MNA. Ils étaient originaires de Guinée (24,67%), du Mali (23,29%), de Côté d’Ivoire (13,16%), du Bengladesh (4,83%), d’Algérie (4,11%). Les trois pays d’Afrique de l’Ouest représentaient 61 % du flux de mineurs orientés par la cellule nationale ( 45,45 % en 2020) et les MNA originaires d’Afrique du Nord 10,57% (18,4 % en 2020 du total des jeunes reconnus MNA soit 1 749 jeunes).
Ces mineurs ont parfois traversé plusieurs pays dans des conditions épouvantables. Certain(e)s ont été victimes de prostitution, d’exploitation ou d’instrumentalisation à des fins juridiques ou économiques, quant aux familles, elles ont dû payer ou se sont endettées auprès de réseaux de passeurs.
En 2001, une étude de la Direction des populations et des migrations distinguait parmi ces enfants : les "exilés" ; les "mandatés", envoyés à l’étranger pour y suivre des études ou pour y travailler et expédier l’argent gagné à la famille ; les "exploités" ; les "fugueurs" et les "errants" c’est-à-dire les enfants des rues, déscolarisés et dormant dans des bidonvilles.
Les demandeurs d’asile
D’après les chiffres de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), les demandes de protection internationale présentées par les MNA sont en constante progression depuis cinq ans (+176,56% entre 2014 et 2019). 755 d’entre eux ont sollicité́ l’asile en 2019 (634 pour l’année 2020 pour 387 admissions) ) ce qui s’avère être une faible proportion comparée au nombre de MNA confié à l’ASE (31 009)
Débat
Outre la question de la coordination et de la simplification des politiques de prise en charge et des méthodes de recension, deux sujets reviennent régulièrement dans les débats : comment soulager les budgets des départements qui assument l’essentiel de la prise en charge des MNA et comment éviter de passer d’une politique de protection de l’enfance à une simple et stricte politique de gestion des flux migratoires ? Le Défenseur des droits met en garde : « l’institution constate que les mineurs non accompagnés sont trop souvent suspectés de fraude, perçus comme des étrangers en situation irrégulière, comme des majeurs, voir comme des délinquants, avant d’être considérés comme des enfants en danger. (…) Progressivement, s’installe l’idée que ces mineurs devraient être considérés comme des migrants, et donc traités comme tels, et non comme des enfants que le droit impose de considérer avec une particulière attention. En parallèle de ces évolutions législatives, le regard que la société porte sur ces mineurs a évolué au gré de divers évènements. Ils sont tour à tour l’objet de soupçons - sur leur âge, leur trajectoire, leur histoire et les motifs de leur arrivée - ou d’admiration lorsque certains d’entre eux sont portés au-devant de la scène médiatique, érigés en modèles de réussite. Toute personne se déclarant mineure non accompagnée interceptée aux frontières terrestres devrait être immédiatement signalée aux services de l’ASE compétents, mise à l’abri dans des conditions appropriées à son statut de mineure présumée et voir sa situation évaluée conformément aux textes en vigueur ».
En septembre 2021, un rapport sénatorial sur les mineurs non accompagnés pointait une augmentation inquiétante des faits de délinquance liés aux jeunes en errance (c’est-à-dire non pris en charge par l’ASE) marqués par des infractions de plus en plus nombreuses, graves et violentes. Serait-ce là un effet des « évolutions législatives » pointées par le Défenseur des droits ?
Mustapha Harzoune, 2022